The Life of an Artist

Lili Reynaud-Dewar

Bas Jan Ader, Giles Bailey, Sacha Béraud, Lars Brekke, Anastasia Bruelle, Samarkande Bruelle, R. Buckminster Fuller, Aloïs Carigiet, Cicciolina, Edward Clive, Mike Clutterbuck, Guy de Cointet, Edmund Cook, Rose Cook, Gustave Courbet, Jane Fawcett, Toon Fibbe, Vincent Gallo, Art Garfunkel, Isabella Girtanner, Livia Girtanner, Gong Gong, Glenn Gould, Spalding Gray, Sastia Julmy, Maria Kasel, Vivian Kasel, Pierre Klossowski, Nino Laisné, Serena Lee, Li Li, Han Suk Lim, Carson Mac Cullers, Fran Meana, Marino Meana, Keith Moon, Anouchka Oler, Catarina de Oliveira, Se Ra Park, Konstantine Raudive, Herbert Read, Gill Roberts, Kirsty Roberts, Nancy Roberts, Jean Rouch, Daphné Roulin, Pierre Schaeffer, Miho Shimizu, Sabrina Soyer, Manon Soyer, Deniz Unal, Isik Unal, Alice Viprey, Johanna Viprey, Mili Weber, Ai Weiwei, Camilla Wills

Et les voix de Jim Colqhoun, Elisabeth Lebovici, Pierre Leguillon, Avigail Moss

Vernissage le jeudi 16 juin à 18 heures
Exposition du 17 juin au 16 juillet 2011
Du mercredi au samedi de 14 à 19 heures

LiveInYourHead
Institut curatorial de la Head–Genève, rue du Beulet 4, 1203 Genève

The Life of an Artist est un projet de l’artiste Lili Reynaud Dewar, mené en collaboration avec le programme WORK.MASTER de la Head–Genève et le Piet Zwart Institute à Rotterdam. Il prend pour point de départ la question de la biographie, envisagée sous ses multiples dimensions – historiques, fictionnelles autant que politiques – comme matrices de l’œuvre d’art. Développée dans le cadre d’ateliers croisés impliquant des étudiant-e-s en Suisse et aux Pays-Bas, cette enquête associe un choix d’invité-e-s internationaux, artistes et théoricien-ne-s, ainsi que des films, des œuvres et des documents. Dans la trilogie imaginée par ses concepteur-trice-s, cette exposition fait suite à un symposium, tenu à Rotterdam en avril, plateforme théorique et performative qui a posé les bases de cette réflexion. Une publication collective, à paraître à l’automne 2011, complète ce dispositif.

En s’attachant à la question particulière de la pratique biographique comme creuset d’un rapport singulier à l’histoire, le projet de Lili Reynaud Dewar éclaire la relation ambivalente–culturelle et politique, subjective et personnelle – que la biographie entretien avec l’archive. L’écriture de ou sur la vie d’une personne brouille encore plus la frontière déjà floue, dans l’écriture de l’histoire, entre la position du biographe et celle du narrateur. En puisant dans la littérature de genre, en faisant usage du crédo féministe « Le personnel est le politique »,en regardant aux marges du travail historique, en s’attardant sur ses dimensions privées, domestiques et quotidiennes, The Life of an Artist entend « déneutraliser » l’écriture de l’histoire. En prenant comme objet des vies d’artis- tes comme moteur d’œuvres dissonantes, en opposition aux récits dominants, objectifs et réglés, l’exposition propose en quelque sorte d’explorer les potentialités d’un genre nouveau : que serait, dans le domaine de l’art, unbiowork au sens de biopic, film biographique, genre à succès dans l’espace du cinéma contemporain ? Et de rappeler qu’à l’autre bout de la chaîne historique se situe un autre modèle possible, les vies des plus excellents peintres, sculpteurs et architectes, écrites par Giorgio Vasari, acte de naissance, au 16e siècle, de la pensée de l’histoire de l’art elle-même.

Le concept de biographie, ou de biographique si l’on peut dire, mène par ailleurs à une réflexion sur les formes mêmes de l’exposition. Entre privé et public, travaillant la question même de la publicité comme mode opératoire, voire essence de la pratique de l’exposition, les artistes installent, au centre de l’espace, un objet spécifiquement réalisé pour l’occasion. Cet objet est la réplique d’un meuble vu lors d’une visite au Musée Gustave Moreau à Paris, un genre de placard qui conserve les dessins préparatoires et croquis nécessaires à la réalisation des peintures installées sur les murs du musée, tout en les déployant comme les pages d’un livre surdimmentionné, produisant une succession de montages et de combinaisons. Icône même de la maison-musée, du musée biographique, typologie spécialement problématique dans l’étude des collections de par sa dimension fortement subjective, encore une fois, le musée Gustave Moreau est à ce titre exemplaire, car conçu de bout en bout par l’artiste comme une tentative totale, obsessive, visionnaire, de restituer dans un même espace visitable sa vie et son œuvre, sa collection et sa généalogie, les appartements de sa famille et son atelier.

A partir de la terminologie sexuée du placard (« sortir du placard », traduction de l’expression anglaise « getting out the closet », signifie « affirmer sa sexualité »), les participant-e-s ont imaginé un mobilier qui cache et montre à la fois les œuvres, qui est l’objet d’une énigme en même que le centre névralgique de l’exposition. Ils ont également invité des membres de leur famille, et pas n’importe lesquels : leurs sœurs, à les rencontrer sur le lieu même de l’exposition, autour dudit placard, comme une tentative de partage d’expérience et un jeu sur la filiation de leurs productions. Dense, touffue voire anarchiste, The Life of an Artiste remêle autant de vies d’artistes utilisées comme trames, lignes de fuite, points lumineux éclairant des destinées singulières, des incursions historiques, des contre-récits qui s’entrecroisent et se diffractent dans l’espace et le temps. Accompagnée de performances et d’événements activant ces histoires et ces récits invisibles, elle s’active et met en scène un véritable art de mémoire, comme en hommage au projet utopique de Gustave Moreau, habitant l’espace d’exposition de ces multiples voix. The Life of an Artist est une collaboration entre le programme WORK.MASTER de la Head–Genève et le Master en Arts Visuels du Piet Zwart Institute, Willem de Kooning Academy, Rotterdam.